Le Syndicat de la magistrature prend connaissance avec consternation des annonces brutales tombant, jour après jour, dans tous les tribunaux. En début d’année, les cours d’appel se sont en effet vu notifier par la Chancellerie un abaissement très important des crédits affectés à la rémunération des magistrats, fonctionnaires, juges de proximité, vacataires, assistants de justice et stagiaires. Les chefs de cours doivent donc prendre des mesures drastiques et brutales, qui sacrifient l’ensemble du fonctionnement judiciaire : non-renouvellement des contrats des vacataires, suppression des emplois d’assistants de justice, réduction des vacations des juges de proximité aboutissant, dans certaines régions, à leur quasi-disparition.

Ces nouvelles restrictions aggravent encore la faillite de la justice. Le Syndicat de la magistrature avait déjà récemment dénoncé l’état de cessation des paiements de certaines juridictions. Ainsi, le tribunal de Nice, comme de nombreux autres, ne parvient plus à payer ses experts...

Désormais, c’est tout le système qui est paralysé. Ainsi, à Orléans, les juges de proximité ne peuvent plus assister aux audiences correctionnelles afin que des crédits soient conservés pour payer les vacataires. Le budget de fonctionnement du tribunal d’instance a été réduit de 30%. A Avesnes-sur-Helpe, deux postes d’assistants de justice ont été supprimés au parquet. A La Rochelle, l’interruption immédiate de la participation des juges de proximité aux audiences a été décidée, ainsi que le non-renouvellement de tous les contrats de vacataires. A Amiens, aucun crédit de fonctionnement ne permettra de payer les assistants de justice et les vacataires. A Tours, les vacations des juges de proximité seront divisées par deux et le budget du tribunal a été réduit de 27%, rendant impossible toute commande de codes... Dans les cours d’appel de Paris et de Toulouse, aucun contrat d’assistant de justice ne sera renouvelé et aucun vacataire ne sera recruté. A Pau, certains contrats d’assistants de justice auraient été brutalement interrompus. Quant à la cour d’appel de Riom, elle n’est plus en mesure de rétribuer les juges de proximité. A Rouen, les crédits ont été gelés pour les assistants de justice. A la Cour de cassation, il semble qu’aucun contrat d’assistant de justice ne sera renouvelé cette année… On pourrait multiplier les exemples à l’infini.

L’interruption soudaine des vacations des juges de proximité illustre parfaitement la précarité de leur statut, que le Syndicat de la magistrature avait dénoncée lors de leur création. De plus, elle va conduire à reporter du jour au lendemain de nouvelles charges imprévues sur les magistrats.

La baisse très importante et soudaine du nombre des vacataires va aggraver encore la situation insupportable des greffes, déjà écrasés par la surcharge résultant de la suppression de près de la moitié des tribunaux d’instance et les réductions d’effectifs.

Pire, la Direction des services judiciaires a indiqué le 17 février, lors d’une réunion concernant l’application pénale Cassiopée, que les vacataires devaient être affectés prioritairement au déploiement de ce logiciel, ce qui aboutit à priver les autres services du renfort attendu... Aux tutelles, il ne sera donc jamais possible de procéder à la révision des dossiers dans les délais fixés par la réforme. Quant aux greffes correctionnels, notamment celui de Paris, ils continueront à ne pas pouvoir récupérer les milliers d’heures supplémentaires effectuées…

Enfin, le non-renouvellement des contrats d’assistants de justice va priver les magistrats de l’aide promise par la Chancellerie pour traiter les dossiers dans des délais raisonnables.

La disparition progressive de ces personnels est d’autant plus inacceptable que les prévisions de recrutements de magistrats et de fonctionnaires pour les années à venir sont dérisoires au regard des départs à la retraite attendus.

Alors que notre pays se situe déjà au 35ème rang européen pour la part de son budget consacrée à la justice, il est intolérable que les moyens humains déjà insuffisants aujourd’hui soient encore amputés. Parallèlement, le ministère de la Justice vient d’engager des sommes considérables pour transférer des tribunaux d’instance jusqu’alors logés gratuitement par les mairies…

Depuis des mois, le Syndicat de la magistrature ne cesse de dénoncer la casse du service public de la justice. Il est aujourd’hui temps de rompre avec l’idéologie désastreuse qui en est la cause : la régression générale des politiques publiques.