Un article récent du journal le Monde nous apprend que le véritable Garde des sceaux serait le conseiller justice de l’Elysée, un certain Patrick Ouart. Cet homme, « aux commandes, dans la salle des machines, parfaitement sûr de lui et de son influence », aurait « la mainmise sur tout ce qui touche à la justice » et inspirerait la crainte à tout le monde (y compris au SM).

L’information a son importance car, depuis près de deux ans, à l’occasion de chaque projet de loi concernant la justice, le Syndicat de la magistrature a vainement tenté d’échanger avec les services du Ministre officiel de la justice, soit pour s’inquiéter de possibles atteintes aux libertés publiques, soit pour dénoncer des remises en cause de la séparation des pouvoirs. Ainsi, l’absence de concertation sur des textes aussi essentiels que la rétention de sûreté, les peines-plancher ou la refonte de la carte judiciaire serait due, non au sectarisme de l’administration, mais à la volonté d’un homme de « l’ombre », « trop heureux de pouvoir imposer sa vision de la justice ».

C’est probablement cette vision moderne de la justice qui fait dire au président de la République, dans un discours à l’audience de rentrée de la Cour de cassation - rédigé, nous dit le Monde, par ce même Patrick Ouart - que l’indignation trouve son « origine dans un syndrome syndical né de l’après 68 ». De cette observation subtile, il résulte que toute réflexion sur les enjeux de justice présente nécessairement un dessein suspect.

Il apparaît ainsi que le ministère de la Justice, après avoir été largement piloté depuis la place Beauvau lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l'Intérieur, se trouve désormais sous la tutelle d'un obscur conseiller de l'Elysée, par ailleurs issu de l'APM, « association très droitière de magistrats », contrainte de se dissoudre après diffusion d’un texte à connotation antisémite visant directement un membre du SM.

Le Syndicat de la magistrature y voit une illustration supplémentaire de la concentration des pouvoirs, particulièrement inquiétante au regard du fonctionnement normal des institutions démocratiques.

Il souhaite que dorénavant les réformes se préparent en toute transparence, dans le respect du dialogue social et des interlocuteurs syndicaux, et non dans le secret du cabinet du chef de l'Etat.