Lors de notre entretien début juillet avec le directeur des services judiciaires, nous lui avons fait part, grâce aux retours des magistrats en juridiction, de l'insuffisance et du caractère très variable localement de la concertation mise en place en vue de l’entrée en vigueur en janvier prochain du bloc de la LPJ relatif à la réorganisation des juridictions (spécialisation des TGI, fusion, juges d’instruction et juges de l’application des peines).

La consultation du site de l’IGJ, chargée par la ministre de formaliser des outils d’aide à la décision des chefs de juridiction, qui doivent rendre leur copie le 1er octobre, confirme que c’est principalement par le prisme statistique que la réforme est envisagée. Deux fiches, mises en ligne le 17 juillet dernier offrent ainsi aux chefs de juridiction l’opportunité de s’entraîner à supprimer ou mutualiser des services grâce à la « simulation ajout de compétence » ou à la « simulation spécialisation ». Elles sont toutes deux siglées de la mention « nouveau ! », comme lorsqu’une marque de lessive lance un nouveau produit.

L’IGJ propose aussi aux chefs de cour un outil d’analyse de l’historique de chaque cabinet d’instruction. Il s’agit là de leur fournir, outre les données chiffrées d’activité, dont on sait à quel point elles reflètent mal la réalité complexe des cabinets, un « historique de l’occupation des postes de juge d’instruction au cours de dernières années afin de mesurer l’attractivité du poste et, le cas échéant, les éventuelles difficultés à le pourvoir ». Ainsi, le fait que certains postes ne soient pas pourvus témoigneraient, selon l’analyse qu’en fait la chancellerie, non pas de la vacance de poste qui a dépassé le chiffre d’un millier au cour des dernières années, ni du choix de la DSJ de pourvoir prioritairement certains postes en en laissant d'autres vacants malgré l'existence de candidatures, mais simplement de la plus ou moins grande attractivité du poste en question. En résumé, on organise budgétairement la pénurie de magistrats, on constate que certains postes qu'on n'a pas souhaité pourvoir ne sont pas pourvus, et on en déduit ensuite qu’il faut les supprimer.

Dans le courrier que vous trouverez ci-joint, nous interpellons la ministre sur cette manière inacceptable de mettre en oeuvre la réforme de l’organisation des juridictions. Nous lui demandons solennellement de créer les conditions d'une concertation réelle dans la phase de travaux que la DSJ vient - enfin - d'ouvrir sur l’évaluation des besoins des juridictions, qui aurait dû impérativement précéder toute velléité de réforme de l’organisation judiciaire. Nous refusons que l’élaboration des référentiels d’activité soit menée à marche forcée, pour correspondre à l’entrée en vigueur de la LPJ, après des années d’inertie de la chancellerie sur ce sujet.
Le courrier adressé à la garde des Sceaux est à télécharger en pièce jointe sur la colonne de droite.

Courrier à la garde des Sceaux 26 juillet 2019 (74.5 KB) Voir la fiche du document