L’actualité parlementaire en matière de violences intrafamiliales a été riche ces derniers mois.

Le 1er décembre, l’Assemblée nationale a adopté à une très courte majorité une proposition de loi déposée par Aurélien Pradié (Les Républicains) portant création d’une juridiction spécialisée aux violences intrafamiliales.

Le 15 décembre, Isabelle Santiago (parti socialiste) a quant à elle déposé une proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales, amendée en commission, qui doit désormais être discutée en séance publique.

Enfin, par lettre du 28 septembre 2022, la Première ministre a donné mission à la sénatrice Dominique Vérien (Les Républicains) de « faire un bilan des actions mises en œuvre et des résultats de la politique menée jusqu’à présent, en particulier depuis le lancement du Grenelle des violences conjugales » en matière de violences intrafamiliales, et de formuler « toutes préconisations utiles permettant de concilier l’exigence de spécialisation des acteurs de justice avec la nécessaire agilité des organisations liée à la diversité des ressorts judiciaires, ainsi qu’au besoin de proximité du traitement judiciaire des contentieux ».

Nous avons ainsi été entendu·es à deux reprises au cours du mois de janvier afin de formuler nos observations sur la proposition de loi Santiago et sur la mission violences intrafamiliales. Nous avons également rédigé des contributions écrites (ci-après).

Si l’objectif poursuivi d’un meilleur traitement judiciaire des violences intrafamiliales est évidemment louable, nous ne pouvons que regretter la tendance générale à aborder la problématique par un prisme avant tout pénal. C’est ainsi que la juridiction spécialisée envisagée ne serait en réalité qu’un juge correctionnel également compétent pour traiter les demandes d’ordonnances de protection et que le législateur souhaite pallier le peu de décisions de retrait de l’autorité parentale par le tribunal correctionnel par une extension de l’automaticité de cette peine complémentaire. Dans le même temps, on observe ces dernières années dans les tribunaux, certes une plus grande prise en compte des violences intrafamiliales – surtout des violences physiques conjugales – mais également un recours grandissant aux procédures de traitement rapides, inappropriées pour réaliser un véritable travail d’enquête sur la situation familiale, préalable pourtant nécessaire au prononcé de peines adaptées. Le manque de fluidité de la transmission de l’information entre les juridictions pénales et civiles, quant à lui, persiste.

Ainsi, nous avons défendu la complémentarité du juge pénal et du juge civil en la matière, ce dernier étant le plus à même, parce que c’est le cœur de son office, d’assurer la protection des intérêts de la victime, notamment mineure. Cela nécessite a minima, tel que le préconise le rapport Sauvé, une véritable revalorisation de la justice civile (du siège mais également du parquet civil) et en parallèle un ralentissement de la cadence pénale, afin de prendre le temps de recueillir des preuves, de mieux communiquer entre services et d’étudier la personnalité de l’auteur et la situation familiale. Cela nécessite aussi, comme toujours, des moyens pour les juridictions à la hauteur de leurs missions. Nous avons enfin rappelé que la réponse aux violences intrafamiliales ne saurait être recherchée uniquement du côté de l’institution judiciaire, qui n’intervient qu’en bout de chaîne, lorsque tout le reste a échoué.

 

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