Communiqué de presse du Syndicat de la magistrature en réaction à la polémique autour des permissions de sortir

L’exploitation démagogique d’un fait divers dramatique n’est malheureusement pas nouvelle, pas plus que la réaction en diptyque « changeons la loi, accusons le juge », elles ont simplement repris du galon avec le déchainement politico-médiatique de ces derniers jours.

Les propositions outrancières de la droite forte, de suppression des juges de l’application des peines ou d’interdiction des permissions de sortie n’ont pas tardé. Attendu, convenu même. Las, le Premier ministre, rappelant son appartenance au club fermé des anciens ministres de l’intérieur, a cru devoir lui aussi invoquer « l’autorité » pour annoncer une loi et la « lucidité » pour mettre en cause « la responsabilité du juge face à un tel dossier ».

De ce brouhaha la raison est absente ! Celle qui aurait dû rappeler combien les permissions de sortie sont une nécessité vitale dans un système pénal qui, même lorsqu’il prive de liberté, doit préparer l’avenir. Que le souci de la réinsertion est au cœur des près de 50 000 permissions de sortie accordées chaque année qui, pour 99,5% d’entre elles, sont des réussites. Que les non- réintégrations sont infimes, concernant moins de 0,5% des permissions. Que celles qui se terminent dans des circonstances aussi dramatiques sont encore plus exceptionnelles. Qu’importe, tout est bon pour crier au scandale, à l’inconséquence et au laxisme des juges et sortir la recette magique : la loi pour brider le juge et le verbe pour l’accuser.

Du recours obligatoire aux autorisations de sortie sous escorte à un durcissement du régime des permissions, le gouvernement n’a pas résisté à la tentation de la modification législative, comme si le risque de non- réintégration, aussi minime qu’inhérent aux permissions, pouvait disparaître par l’ajout d’obstacles légaux supplémentaires !

Accuser le juge et la boucle est bouclée.

Leurs responsabilités, les juges de l’application des peines les assument au quotidien, lorsque, appliquant la loi, ils examinent sans simplisme ni populisme, les demandes des personnes détenues, recueillent avis et informations pour individualiser la peine, travailler à la réinsertion, au maintien des liens familiaux, au retour progressif de la personne dans la société. Ils ne reculent pas devant l’anathème qui veut les tenir comptables des actes d’un autre car ils savent combien leur mission, si difficile soit-elle, est essentielle à la protection de la société.