Rétention : la Justice se rend à l’Intérieur
Dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les ordonnances du 25 mars puis du 20 mai 2020 prévoient une organisation dérogatoire de l’ensemble du fonctionnement de la justice, avec la possibilité de statuer à juge unique, de réduire la publicité des audiences, d’utiliser un moyen de télécommunication audiovisuelle et même d’entendre les parties par téléphone, voire de ne pas tenir d’audience pour certaines procédures.
Si la plupart de ces dispositions sont à la discrétion des magistrat·e·s, la majorité des personnes étrangères en rétention sont, depuis le début de l’état d’urgence sanitaire, jugées à distance, par visioconférence, par téléphone voire sans audiences.
Les conséquences sont désastreuses pour la défense des droits. Une bonne partie de ces personnes ne maîtrisent pas le français et comparaissent ainsi sans pouvoir comprendre correctement les propos exprimés. La mauvaise qualité des transmissions audiovisuelles, l’absence, parfois, d’interprète, ou l’impossibilité de voir toutes les parties, nuisent fortement au respect du principe d’un procès équitable. La préparation de la défense entre avocat·e·s à distance et personnes enfermées est souvent réduite à quelques minutes. L’utilisation de salles en principe destinées aux entretiens par visioconférence avec l’OFPRA, situées au cœur des centres de rétention, à proximité desquelles se tient la police aux frontières, ne permet pas de garantir la confidentialité des échanges. La publicité des audiences est grandement affectée par ces dispositifs. (...)