Monsieur le secrétaire général,

A la suite de notre entretien téléphonique de vendredi dernier, le Syndicat de la magistrature souhaite à nouveau vous alerter sur la situation dramatique du service public de la justice dans le département de la Guyane.

Depuis plusieurs jours, les avocats du barreau de Cayenne sont en grève pour dénoncer les conditions inadmissibles de fonctionnement de la justice.

Ils ont reçu l'entier soutien des magistrats du tribunal de grande instance, qui, en assemble générale, ont demandé des mesures exceptionnelles pour faire face à la situation dramatique de la juridiction.

En effet, la pénurie en moyens humains et matériels atteint des proportions inégalées. Faute de fonctionnaire, la régie du tribunal ne fonctionne plus.

Alors que le greffe connaît 10 vacances de poste, les dernières CAP nationales n'ont proposé que 5 postes à la mobilité et seulement trois nouveaux fonctionnaires seront affectés en mai.

Vous nous avez indiqué téléphoniquement qu'eu égard à la situation, l'inspection des services judiciaires devait se rendre sur place pour évaluer les difficultés et faire des propositions.

Pourtant, la situation de la justice en Guyane est connue depuis de nombreuses années. Sur place, les élus comme les professionnels de justice réclament depuis longtemps la création d'une Cour d'appel et d'un second TGI à St Laurent du Maroni.

Ces demandes n'ont rien de surprenant au regard de l'augmentation de la population qui, d'ici 10 ans, atteindra le seuil des 400.000 habitants et sera donc comparable à celle de la Martinique.

En outre, le rattachement du TGI de Cayenne à la Cour d'appel de Fort de France, située à 18000 Km, est source de retard comme de lourdeur en terme de fonctionnement administratif.

Enfin, il est important de souligner que la Guyane est le seul département français d'Outre-Mer qui ne bénéficie pas d'une telle organisation judiciaire.

L'absence de réponse immédiate à la crise que traverse le service public de la justice à Cayenne nous paraît inquiétante. Nous espérons qu'elle n'est pas révélatrice d'une politique de rigueur plus globale qui conduit la chancellerie à ne pas pourvoir les postes devenus vacants.

Nous tenons à rappeler que cette absence de prise en compte de la réalité des difficultés des juridictions françaises s'opère au détriment des justiciables les plus fragiles qui subissent des délais de plus en plus longs pour obtenir une décision de justice et qui doivent parcourir des distances importantes pour accéder au juge.

Au regard de cette situation dramatique, le Syndicat de la magistrature apporte tout son soutien au mouvement de protestation des personnels de justice de la Guyane.

Nous vous demandons de bien vouloir nous tenir informés des mesures qui seront prises par vos services pour permettre au service public de la justice de fonctionner dans des conditions décentes dans ce département d'Outre-Mer.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le secrétaire général, l'expression de nos cordiales salutations.


Pour le Syndicat de la magistrature,
Matthieu Bonduelle
secrétaire général.