[OEE] Résister pour le respect des droits : non à la systématisation de la visioconférence en CRA !
L’Observatoire de l’enfermement des étrangers, dont le Syndicat de la magistrature fait partie, affirme à la crainte de voir la visioconférence se généraliser dans le contentieux des étrangers, notamment au tribunal judiciaire de Lyon qui compte deux centres de rétention administrative très importants.
L’institution judiciaire ne peut renoncer complètement à son office et admettre de juger, par principe, en visioconférence.
Publié le 19 novembre 2025
De renoncements en renoncements, le contentieux des étrangers demeure le laboratoire de la justice de demain : rendue par visioconférence, déshumanisée et éloignée des justiciables. Cette « justice-webcam », le tribunal judiciaire de Lyon s’apprête à la mettre en application puisqu’il est envisagé que l’ensemble des juges statuant en matière de rétention administrative tiennent leurs audiences par visioconférence.
Un tel renversement des principes prévus par les dispositions du CESEDA est manifestement illégal. L’article L743-7 prévoit en effet que l’audience doit être tenue par le tribunal dans la salle aménagée à proximité des CRA et ce « afin d'assurer une bonne administration de la justice et de permettre à la personne étrangère de présenter ses explications ».
L’Observatoire de l’Enfermement des Étrangers dénonce régulièrement le fait que les personnes étrangères ne puissent plus prétendre à ce que la régularité des mesures de rétention administrative soit jugée dans l’enceinte d’un tribunal. Ces personnes ont d’ores et déjà vu leurs audiences reléguées dans des pseudos-salles d’audience à proximité des CRA. Elles devraient aujourd’hui admettre que la visioconférence, qui devait être l’exception, devienne la norme et que l’autorité judiciaire ne se déplace plus.
La systématisation de la visioconférence porte atteinte à la qualité de la justice rendue. Comme le démontre le rapport publié par l’OEE en juin 2022 « En finir avec les audiences par "visio"», cette dernière empêche le juge de remplir son office, sans compter la barrière de la langue et la complexité de la procédure. Enfin, elle restreint les droits de la défense et le contradictoire, les avocat·es se trouvant le plus souvent dans les tribunaux et non aux côtés des personnes étrangères.
Alors que l’OEE milite pour la disparition pure et simple de la rétention administrative, nos associations exigent une justice humaine et accessible, dans un contexte où les « impossibilités de faire » opposés par l’administration pour justifier le recours systématique à la visioconférence se multiplient. Au-delà du contentieux imposé aux personnes étrangères, ce sont aussi l’instruction, la justice pénale des mineurs et post-sentencielle qui sont également visées.
L’observatoire de l’enfermement des étrangers rappelle qu’une justice décente a besoin de moyens pour fonctionner et que le respect des droits fondamentaux des personnes enfermées doit primer sur une politique d’enfermement et d’expulsion répressive et destructrice pour ces personnes.
Organisations membres de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers : ACAT-France, Anafé, Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), Cercle des voisins du CRA de Cornebarrieu, Comede, Droits d’urgence, Fasti, Gisti, La Cimade, Le Paria, Ligue des droits de l'Homme, MRAP, Observatoire Citoyen du CRA d’Oissel, Observatoire Citoyen du CRA de Palaiseau, Observatoire international des prisons (section française), Syndicat des avocats de France (SAF), Syndicat de la magistrature (SM).