Le Syndicat de la magistrature a été entendu le 24 juin par la garde des Sceaux, des membres de son cabinet et de l'Inspection, la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse ainsi que la directrice des affaires criminelles et des grâces, sur l'avant-projet de code de la justice pénale des mineurs.


Une fois de plus, nous avons dénoncé la méthode qui consiste à ne pas nous consulter pendant toute la période d'élaboration du projet (hormis une audition sollicitée par le collectif dont nous faisons partie avant que de connaître les orientations précises du projet). En effet, dès lors que nous avons demandé à avoir une idée précise des orientations envisagées, aucun rendez-vous ne nous a été proposé avant le 24 juin, étant précisé que le projet a par ailleurs été examiné en comité technique des services judiciaires le 27 juin et sera présenté ce jour au conseil d'Etat pour avis, ce qui augure déjà de l'attention qui a pu être apportée à nos observations dans un délai aussi contraint.


Par ailleurs, nous avons dénoncé un projet de code qui s'éloigne fondamentalement des grands principes posés par l'ordonnance du 2 février 1945 à savoir la protection des mineurs, la spécialisation des acteurs et des règles les concernant, l'atténuation de la responsabilité et le primat de l'éducatif sur le répressif.


La création d'une présomption d'absence de discernement et donc de responsabilité pénale en dessous de 13 ans est une mesure d'affichage qui ne change pas véritablement le droit actuel, même si l'on peut considérer qu'il s'agit d'une petite avancée, et qui semble n'avoir été destinée qu'à occuper l'attention des médias pour masquer le fond de la réforme.
En effet, sous couvert d'un rappel formel de ces principes et d'adoption du principe de la césure du procès pénal, réclamé par nombre de juges des enfants ainsi que le Syndicat de la magistrature, le projet, dans l'articulation même de la procédure qui est imaginée, porte considérablement atteinte à l'essence même de la justice des mineurs, notamment par l'accélération notable de la procédure qui sera enserrée dans des délais contraints, et par la multiplication des possibilités de juger les mineurs en une seule audience, sans travail éducatif préalable à la sanction.


Nous avons dénoncé un projet qui confond mesure éducative et sursis probatoire et qui ne tient absolument pas compte du temps nécessaire à un adolescent pour évoluer. Les délais imposés et les modes de convocation conduiront par ailleurs le juge des enfants à ne plus avoir le moindre rôle dans l'articulation des audiences pour un même mineur, la possibilité pour ce dernier d'être suivi par un même juge des enfants à chaque audience apparaissant d'ailleurs très illusoire.


Enfin, cet avant-projet ne résout en rien ce qui actuellement est la cause des difficultés et des délais de la justice pénale des mineurs, à savoir le déficit de moyens humains dans les tribunaux et à la protection judiciaire de la jeunesse. Les délais fixes de procédure tels qu'ils sont prévus risquent de conduire les magistrats à sacrifier l'assistance éducative au profit du pénal et à rendre impossible la mise en œuvre des mesures éducatives par la protection judiciaire de la jeunesse.


Nous continuerons de dénoncer ce projet et d'agir pour qu'il soit modifié, au sein du collectif de défense de la justice des enfants et des adolescents dont nous faisons partie au côté du Syndicat des avocats de France, de syndicats de personnels de la protection judiciaire de la jeunesse (SNPES-PJJ/FSU, CGT PJJ, Solidaires) et de l'aide sociale à l'enfance ainsi que d'autres organisations comme la Ligue des droits de l'homme. Nous avons à ce titre participé à une conférence de presse le 25 juin 2019 avec ce collectif et le Conseil national des barreaux, pour faire comprendre le projet de réforme et faire part de nos propositions.
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L'intégralité de nos observations est à télécharger ci-dessous.

Réforme de l’ordonnance de 1945 : les principes fondateurs de la justice des mineurs en danger (216.05 KB) Voir la fiche du document