Le ministre des expulsions et de « l’identité nationale » a annoncé mercredi 18 novembre qu’il allait « engager une réflexion » sur les « mariages gris ». Il s’agit, nous prévient-il, de partir en croisade contre les mariages « conclus en abusant de la vulnérabilité de personnes en situation de faiblesse, dans le seul but d’obtenir un titre de séjour ou un accès à la nationalité française ».

A l’appui de ce qu’il présente comme une « escroquerie sentimentale à but migratoire », Eric Besson ne fournit aucune étude statistique justifiant la création d’un groupe de travail pour lutter contre ces mariages binationaux. En réalité, en choisissant une expression volontairement indigne et infâmante, ce ministre souhaite attirer l’attention médiatique sur ses gesticulations nauséabondes. Mais il s’agit surtout de jeter l’opprobre sur les mariages mixtes en laissant entendre que l’échec du couple repose nécessairement sur l’intention malveillante du conjoint étranger. A n’en pas douter, le groupe de travail - auquel a opportunément été associé le ministère de la Justice - ne manquera pas de trouver une traduction pénale à ce nouvel écart démagogique. Peut-être pourrait-il commencer par rappeler à Eric Besson que les distinctions entre les personnes physiques à raison de leur origine constitue une discrimination aux termes de l’article 225-1 du Code pénal ?

Avec cette dernière provocation, la majorité au pouvoir nous rappelle qu’il est donc possible, en France, en 2009 :

- de déclarer publiquement qu’un jeune homme « ne correspond pas du tout au prototype » de « l’Auvergnat » parce qu’il mange du cochon et boit de la bière, ou encore que c’est quand « il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes » ;
- de demander aux intellectuels de se soumettre à un devoir de réserve lorsqu’ils entendent exprimer un point de vue sur le sarkozisme ;
- de qualifier de « gris » des mariages prétendument douteux entre français et étranger ;

Le Syndicat de la magistrature est profondément indigné de l’escalade verbale à l’œuvre au plus haut sommet de l’Etat et rappelle son attachement aux principes fondamentaux de la liberté du mariage comme du droit à une vie privée et familiale sans discriminations.