communiqué de presse du Syndicat de la magistrature après l'attaque dont a été victime Charlie hebdo le 7 janvier 2015

C’est d’abord l’effroi qui nous a saisis hier, en apprenant le crime commis contre ces grands noms de la caricature et du journalisme, mais aussi ces policiers, morts ou blessés en tentant de protéger la liberté d’expression et ces inconnus, tous victimes d’un fanatisme aveugle. Puis, l’élan de solidarité nous a pris, nous qui avions tant ri en découvrant, dans les dessins que nous offraient ces grands caricaturistes, les traits de l’injustice que nous dénonçons toujours.


Et nous avons rejoint les rassemblements spontanés du soir où tant d’anonymes endeuillés réclamaient « face à la terreur, plus de démocratie ».


Cette réunion spontanée des consciences doit nous engager, dans la durée et non dans le seul temps de l'émotion, à tout faire pour tenir en échec ceux qui veulent, en brouillant les repères d'égalité et de fraternité, installer l'affrontement et la guerre entre communautés.


Nous y sommes d'autant plus tenus que bien vite, malheureusement, trop vite, l’indécence est réapparue ça et là, fissurant le mur de solidarité érigé pour protéger nos libertés.


Indécence de sommer nos concitoyens de se « désolidariser », au risque d’être rangés – par ces moralisateurs zélés – dans le clan de l’ennemi intérieur.


Indécence de prétendre vouloir « libérer une parole » que tant se sont déjà employés à charger de haine à l’égard de nos concitoyens à raison de leurs origines, réelles ou fantasmées, ou de leur religion.


Indécence d’appeler déjà à « prendre des mesures » quand ce qu’il faut c’est, ravalant la tristesse et l’effroi, défendre la liberté à tout prix. Porter haut et fort la liberté d’expression mais plus encore nos libertés afin que la digue ne cède pas, libérant la vague liberticide qui se nourrirait des peurs.


Au Syndicat de la magistrature, l’insolence est notre joyeux compagnon de route, comme Charlie l’a été, et nous voulons l’honorer, sous toutes ses formes, même lorsque le rire se fait plus rare. Nous continuerons à participer aux rassemblements citoyens et appelons chacun à s’y joindre pour exprimer sa solidarité et défendre l’idée que nous nous faisons de nos libertés.