Le Conseil constitutionnel vient de rendre sa décision sur la loi organique relative à l’article 65 de la Constitution portant sur le Conseil supérieur de la magistrature.

Le Conseil a censuré trois dispositions de cette loi et émis une réserve d’interprétation :

- Le Conseil a d’abord considéré que l’article 15 de la loi organique ajoutait à la Constitution en ce qu’il imposait à la formation disciplinaire du CSM de toujours siéger dans une composition comprenant autant de magistrats que de non-magistrats ;

- Le Conseil a ensuite censuré l’article 17 de la loi qui permettait au CSM de s’auto-saisir pour se prononcer sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ;

- Le Conseil a par ailleurs décidé que la possibilité pour les justiciables, dans certaines hypothèses, de saisir le CSM d’une plainte contre un magistrat toujours en charge d’une procédure, présentait un risque d’atteinte à l’impartialité ou à l’indépendance de ce dernier ;

- Enfin, le Conseil, par une réserve d’interprétation portant sur les dispositions relatives à la déontologie, l’indépendance et l’impartialité des membres du CSM, a tiré les conséquences de ces principes en interdisant aux chefs de tribunaux et de cours du CSM de statuer sur le cas des magistrats de leurs ressorts.

Cette décision, si elle comporte deux avancées significatives, ne peut toutefois nous satisfaire.

Certes, l’édiction de règles strictes visant à préserver l’impartialité des membres du CSM est bienvenue, tant le fonctionnement de l’actuel CSM a pu montrer des errements dans ce domaine.

De même, le Syndicat de la magistrature, favorable à la saisine directe du CSM par les justiciables, a néanmoins milité pour que cette procédure, dans ses conditions d’exercice, ne puisse pas être un facteur de déstabilisation de l’institution judiciaire. Le Conseil constitutionnel s’est montré vigilant sur ce point en estimant que la loi organique n’apportait pas suffisamment de garanties dans les conditions de recevabilité d’une plainte lorsque le magistrat mis en cause est encore en charge de la procédure.

Le Syndicat de la magistrature est en revanche très inquiet du « muselage » du CSM opéré par le Conseil constitutionnel qui censure toute possibilité d’expression spontanée de la formation plénière sur les questions de déontologie des magistrats, et par là même d’indépendance. Lors des débats parlementaires qui avaient présidé à l’adoption de cette loi, le garde des Sceaux lui-même avait pourtant admis cette possibilité d’auto-saisine du CSM sur ces sujets de principe.

Il déplore également que le Conseil ait censuré, en matière disciplinaire, l’exigence de parité effective entre les membres magistrats et les non-magistrats. Le Syndicat de la magistrature avait soutenu cette exigence, au regard notamment des standards européens. Concrètement, cette censure rendra possible la tenue d’audiences disciplinaires par une formation déséquilibrée.

Au-delà de cette décision, le Syndicat de la magistrature rappelle qu’il s’est érigé contre les vices originels de la réforme constitutionnelle adoptée le 23 juillet 2008 dont est issu le nouveau CSM : un mode de nomination des six membres extérieurs éminemment partisan, une surreprésentation de la haute hiérarchie judiciaire, la persistance d’un avis simple pour la nomination des magistrats du parquet, etc.

Enfin, le Syndicat de la magistrature s’étonne que le Conseil constitutionnel, contrairement à sa jurisprudence constante, n’ait pas jugé bon de censurer les articles 12 et 18 de la loi organique qui constituent des « cavaliers législatifs ». Il est vrai que ces deux articles ont été conçus dans le seul but d’exercer des représailles à l’encontre du premier président de la Cour de cassation soupçonné d’être rétif à l’application de la question prioritaire de constitutionnalité...