Communiqué de presse du Syndicat de la magistrature après l'introduction, par la Commission des lois du Sénat de la mutualisation des greffes dans le projet de loi J21

Constatant le décalage entre « l’ampleur du travail de réflexion » engagé par le Gouvernement et sa « traduction beaucoup plus modeste » dans le projet de loi estampillé J21, la Commission des lois du Sénat à décidé de « rehausser les ambitions du texte ». On sera servi !

La Commission des lois aurait-elle eu pour souci de repenser le champ d’intervention de la justice et ses modes de fonctionnement gestionnaires ? De proposer, par exemple, d’audacieuses dépénalisations ou déjudiciarisations ou encore de revenir sur des traitements judiciaires déshumanisants et expéditifs ?

Non, son objectif est clair : faire reposer sur les personnels de greffe la gestion d’une pénurie organisée par des années de disette budgétaire !

La commission des lois a donc introduit un article 13 bis qui prévoit que les fonctionnaires des tribunaux de grande instance, des conseils de prud’hommes et de tribunaux d’instance situés dans un périmètre qui sera fixé par décret seront mutualisés et pourront être affectés, sur la seule décision du président du tribunal de grande instance, dans l’un de ces tribunaux, « pour nécessité de service ». Tout à son « ambition », la commission des lois a royalement ignoré, et les missions des directeurs de greffe et le rôle du ministère dans l’affectation des fonctionnaires pour un service public égal pour tous…

Ainsi, les fonctionnaires de greffe ne seront plus, dans cette justice si moderne du 21ème siècle, que des pions que l’on pourra déplacer au gré des besoins. Flexibles fusibles autant qu’alibis commodes pour imposer d’en bas des fermetures de juridictions excentrées, au mépris de la continuité du service public.

Malgré l’abandon par la garde des Sceaux d’un Tribunal de première instance qui n’avait d’autre objectif que de mutualiser fonctionnaires et magistrats pour gérer la pénurie au détriment de la qualité du service public de la justice, le TPI revient par la petite porte : fragilisation des tribunaux d’instance qui se voient retirer peu à peu des pans entiers de leur contentieux de proximité, fusion des 20 tribunaux d’instance parisiens, cobayes tous désignés, au sein d’une juridiction unique siégeant au futur TGI des Batignolles, perte d’autonomie de ces juridictions intégrées dans le pôle proximité coordonné au niveau des tribunaux de grande instance…

La boucle est – presque – bouclée avec la mutualisation des greffes. Le Syndicat de la magistrature s’oppose à cette mesure qui heurte de front le statut des fonctionnaires et demande aux parlementaires d’avoir d’autres ambitions pour la justice du 21ème siècle en ne votant pas cet amendement.