Justice en faillite : Motion des magistrats du TGI de Bobigny
Publié le Dec. 1, 2015
Motion adoptée en Assemblée générale à l'initiative des sections locales du Syndicat de la magistrature et de l'Union syndicale des magistrats
"Les magistrats du tribunal de grande instance de Bobigny :1° ) Dénoncent l'extrême pénurie des moyens humains alloués au service public de la justice dans le département de la Seine-Saint-Denis, ce au détriment des justiciables.
En effet , à compter du 1er janvier 2016, le tribunal de grande instance de Bobigny sera amputé de 25 % de ses magistrats du siège et de 8 % de ses magistrats du parquet.
Ce manque dramatique de magistrats constitue, dans un contexte de crise sociale, économique, politique et d'état d'urgence proclamé, un réel danger pour les justiciables du département de la Seine-Saint-Denis.
Après les attentats du 7 janvier 2015 et du 13 novembre 2015, force est de constater que les pouvoirs publics n'ont manifestement pas pris la mesure des enjeux spécifiques qui pèsent sur ce département.
Aux difficultés sociales du département va s'ajouter le handicap d'une justice en grande difficulté, dont voici quelques exemples éloquents :
- les délais de convocation devant le juge aux affaires familiales sont de 12 mois ;
- A l'instance, les délais de convocation sont de 15 mois tant pour les dossiers de surendettement que pour les dossiers de départage prud'homal;
- 16 audiences civiles par mois seront supprimées au sein du Pôle « biens », du Pôle « économique » et du Pôle des « urgences » (référés) ;
- le développement du Grand Paris et la rénovation de l'habitat insalubre vont se trouver empêchés par l’indigence des moyens mis à disposition du tribunal : en l'état actuel des stocks, il faudra trois ans à un juge pour les traiter ;
- depuis son transfert au TGI de Bobigny, en novembre 2010, le service des tutelles mineurs qui a en charge près de 6800 dossiers, ne s'est vu affecter aucun juge dédié,
- le Tribunal pour Enfants de Seine Saint Denis connaît de lourds délais d'attente pouvant atteindre une année, tant pour les mineurs en danger que pour ceux qui commettent une infraction ;
- les victimes de Seine-Saint-Denis doivent savoir que 16 audiences correctionnelles par mois seront supprimées faute de disposer de juges pour y siéger, ce qui signifie que leur affaire sera jugée dans des délais contraires à la convention européenne des droits de l'homme ;
-le tribunal de grande instance de Bobigny, pourtant le deuxième de France par la taille, ne dispose plus d'assez de juges pour siéger dans toutes les sessions de ses cours d'assises, même s'il procède à la suppression d'une audience correctionnelle sur cinq ;
- A l'instruction, 160 dossiers , y compris criminels, ne seront plus traités en raison de la vacances de postes de juges d'instruction;
2° ) En conséquence, les magistrats du tribunal de grande instance de Bobigny :
- demandent à être reçus rapidement par Mesdames la ministre de la justice, la directrice des services judiciaires et la première présidente de la cour d'appel de Paris afin que les besoins des juridictions du département soient enfin pris en considération et rapidement pourvus ;
- souhaitent interpeller tant les pouvoirs publics que les justiciables en organisant des journées d'action et de mobilisation collective, en partenariat, avec l'ensemble des professionnels qui participent à l'œuvre de justice ;
-décident que le premier acte de cette mobilisation collective prendra effet sous la forme d'une journée "justice en faillite".
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