Dans le cadre de l’entrée en vigueur de la réforme de la procédure civile, nous avons, le 23 décembre 2019, avec le SAF, et aux côtés du CNB, saisi le Conseil d’Etat d’une requête en référé suspension du décret, ainsi que d’un recours au fond.

Nous avons dénoncé le manque de concertation ainsi que le manque d’anticipation de cette réforme d'ampleur, le dernier décret d’application étant daté du 11 décembre 2019 - suivi d’un décret rectificatif du 20 décembre - soit moins de trois semaines avant l’entrée en vigueur de la loi, empêchant de fait les juridictions et les barreaux d’être prêts à temps.

Nous avons notamment fondé notre recours sur :
- l’atteinte au droit à un procès équitable dès lors que l’introduction du principe de l’exécution provisoire de droit des décisions de première instance limitera dans les faits la possibilité pour le requérant de faire appel. Nous avons également soulevé que ces dispositions excédaient la compétence du pouvoir réglementaire dès lors qu'elles ne sont pas prévues par la loi du 23 mars 2019 ;
- le vice de procédure au vu de l’absence de consultation de la CNIL,
- la méconnaissance du règlement relatif à la protection des données physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel du 27 avril 2016 au vu de l’exigence, pour toute demande initiale formée par voie électronique, à peine de nullité, de la mention de l’adresse électronique et du numéro de téléphone du demandeur,
- la méconnaissance du principe de sécurité juridique dès lors que l’article 768 du code de procédure civile qu’il modifie est susceptible de s’appliquer aux instances en cours.

Le Conseil d’Etat a rejeté le référé le 30 décembre, estimant notamment que les dispositions relatives à la mention de l'adresse électronique et du numéro de téléphone du défendeur n’ont vocation à s'appliquer que pour les demandes formées sur le portail unique du justiciable, qui n'est pas encore prêt, ce qui implique que la condition d’urgence nécessaire pour le référé n’est pas remplie. Il a par ailleurs considéré qu'il n'y avait pas non plus urgence s'agissant de l'exécution provisoire de droit puisqu'elle ne concerne que les instances introduites postérieurement au 1er janvier 2020. Le Conseil d'Etat n’a pas encore statué au fond. Il a toutefois retenu que le report de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2020 était « bref » et a pu « regretter qu’une adoption plus précoce du décret n’ait pas été possible ».