Communiqué de presse commun du 12 octobre 2017 du Syndicat de la magistrature et du SNPES-PJJ/FSU en réaction à l'annonce de la ministre de la justice de construire vingt nouveaux CEF

{{SORTONS DE L’ENFERMEMENT:
NON A LA CRÉATION DE NOUVEAUX CENTRES ÉDUCATIFS FERMÉS !}}
Mercredi 27 septembre, lors de la présentation du budget du ministère de la justice, la Garde des Sceaux a annoncé pour la Protection Judiciaire de la Jeunesse, la création de 20 nouveaux centres éducatifs fermés durant le quinquennat. Cette annonce budgétairement coûteuse et éducativement inopérante est une provocation, au moment où les conditions d'accueil des jeunes et de travail des professionnel.le.s se sont dégradées depuis plusieurs années par manque de moyens humains et budgétaires.
Le fonctionnement des 20 CEF nécessitera 600 professionnel.le.s quand les milieux ouverts, qui prennent en charge l'immense majorité des enfants et des adolescent.e.s ne pourront compter que sur 40 postes supplémentaires d'éducateur.trice.s pour 2018. Nous dénonçons que tant de moyens soient dévolus à l'enfermement alors que l'insertion et les établissements de placement éducatif sont considérablement fragilisés.
Rappelons que la création des CEF en 2003 ne relevait aucunement d’une logique éducative tenant compte des difficultés des jeunes, mais d’une commande politique sécuritaire. Ces structures représentent un élément d'un dispositif répressif passant par l'enfermement. Actuellement, il y a en France 52 CEF.
Hier comme aujourd’hui, les CEF n'ont jamais constitué une alternative à l'incarcération. Quinze ans après leur création, nous constatons que dans ces lieux d'enfermement et de privation de liberté des dysfonctionnements sont régulièrement relevés par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Présentés comme une dernière chance avant l'incarcération, ils sont en réalité souvent proposés à la place de lieux de placement éducatifs et se trouvent être de fait l'antichambre de la prison. En effet, la situation d’enfermement et le cadre mis en place créent les conditions pour que surviennent des incidents, qui viennent aggraver la situation pénale d'un nombre important d'adolescent.e.s. Ils participent de la banalisation de l’enfermement et de l'incarcération, majorée par une politique pénale plus répressive.
La création des CEF a ainsi un effet mécanique amenant une réponse plus sévère, puisqu'un placement dans ces structures ne peut être ordonné sans mesure de contrôle judiciaire ou de sursis avec mise à l’épreuve, avec pour effet l'incarcération en cas de non-respect des obligations du placement. Au 1er août 2017, 885 jeunes étaient incarcéré.es, chiffre précédemment jamais atteint, dont plus de 70% au titre de la détention provisoire.
L'enfermement est une violence. Cette violence touche particulièrement les jeunes pris.e.s en charge par la PJJ, souvent en détresse sur le plan familial, psychologique, et social. La surveillance constante relève davantage de l'application de règles pour redresser des comportements que d'un travail individualisé sur la situation globale de chaque adolescent.e. Ces pratiques entraînent une confrontation permanente entre les jeunes et les professionnel.le.s et des relations marquées par des rapports de force.
De plus, de nombreuses maltraitances, atteintes aux droits des jeunes, dysfonctionnements ont été constatés dans les différents CEF. Malgré une note de l’administration centrale du 4 août 2015 demandant expressément aux échelons hiérarchiques de renforcer leurs contrôles sur ces établissements et d'être extrêmement vigilant.e.s quant aux risques de dérives violentes dans les pratiques éducatives, plusieurs CEF ont fermé suite à des violences graves envers les jeunes sans que cela ne conduise à une analyse et une remise en cause de ce type de prise en charge. C’est au contraire l’annonce de l'ouverture de 20 nouveaux CEF qui constitue aujourd’hui la seule réponse officielle du gouvernement à cette situation.
Nous continuons à demander la transformation immédiate des CEF en lieux de placement éducatif et la réorientation des moyens dédiés aux structures d'enfermement vers les services éducatifs.
Nous réaffirmons que la priorité doit être résolument donnée à l'éducation. Déjà engagé.e.s dans une campagne contre l'enfermement, dont l’organisation d’un colloque sur ce thème l’année prochaine, notre détermination à lutter contre ce projet de nouveaux CEF sera entière.