Communiqué de presse du Syndicat de la magistrature en réaction à cinq décisions de la Cour d'appel de Paris en date du 24 juin 2015 condamnant l'Etat en raison de contrôles d''identité discriminatoires

Vos papiers ! La mécanique est redoutable, le coup imparable : sélectionner un quidam sur son apparence, le soumettre à un contrôle d’identité épargné à d’autres et prétendre qu’il ne s’agit là que d’appliquer l’article 78-2 du code de procédure pénale.

Le premier grain de sable est venu des citoyens, rapidement rejoints par organisations et universitaires démontrant la scandaleuse banalité des contrôles au faciès. Fondés sur des critères discriminatoires, ces contrôles nient l’identité de ceux qui les subissent. Leur réalité a longtemps été contestée et leur reconnaissance tardive n'a pas valu récépissé : les policiers n’en ont finalement eu que pour leur matricule…

Mais voilà que la justice vient rappeler l’Etat à ses devoirs : assurer dans les opérations policières « le principe d’égalité de traitement que toute personne est légitimement en droit d’attendre du service public de la justice ».

Dans cinq arrêts rendus ce jour, la Cour d’appel de Paris condamne l’Etat pour faute lourde en raison du caractère discriminatoire de contrôles d’identité opérés sur la base de l’apparence physique des personnes contrôlées, de la couleur de leur peau ou de leur origine étrangère supposée.

Au-delà de la reconnaissance judiciaire du scandale de ces discriminations raciales, la Cour ouvre une voie d’action efficace contre ces abus. Constatant que l’absence de traçabilité des contrôles d’identité entrave le contrôle juridictionnel, elle accepte de se fonder sur un faisceau de circonstances graves, précises et concordantes. Les témoignages sont ici renforcés par les statistiques générales, révélant le « sur contrôle » frappant certaines populations, que la Cour retient au nombre des éléments d’appréciation.

La justice consacre ainsi le droit au recours effectif contre les pratiques policières abusives et met en lumière un cadre légal des contrôles à ce point laxiste qu’ils peuvent être réalisés sans motif particulier, sans soupçon objectivable.

Que faire face à la police ? Ne plus se résigner, assigner, témoigner jusqu’à ce que le droit des contrôles d’identité soit enfin réformé. La condamnation est judiciaire, la responsabilité est politique : des récépissés à la réécriture de l’article 78-2, il est urgent d’agir au nom de l’égalité !