Le chapitre V du projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire » porte sur l’exécution des peines et comporte trois dispositions principales :
- l’extension du champ d’application de l’ordonnance d’incarcération provisoire (art 712-19 du CPP)

- la modification de l’article 720 du code de procédure pénale par l’ajout de deux alinéas per- mettant l’octroi de plein droit (sous certaines conditions relatives à la peine exécutée) d’une mesure de libération sous contrainte (LSC) dès lors que le reliquat de peine à exécuter est inférieur à trois mois ;

- la refonte du système des réductions de peine avec la fusion des crédits de réduction de pei- ne avec les réductions supplémentaires de peine.

Il est difficile d’apprécier l’effet de telles mesures sur la durée moyenne d’incarcération mais en tout état de cause rien ne permet d’affirmer que celle-ci soit amenée à baisser. Nous pou- vons relever que le Conseil d’Etat note, dans son avis sur le projet de loi que le projet de loi durcit donc le régime de retrait des réduction de peines, avec en conséquence un risque que cela entraîne une augmentation de la durée moyenne d’incarcération. Si l’on se fie à l’étude d’impact, en supposant que le taux d’octroi des futurs réductions de peine sera similaire à celui des réductions de peine supplémentaires, la réforme entraînerait une augmentation de la population carcérale comprise entre 8207 et 12750 personnes. Si la réforme de la LSC concerne un certain nombre de condamnés (6445 en janvier 2021 selon l’étude d’impact), rien ne garantit qu’elle permette d’endiguer l’augmentation de la surpopulation carcérale.

Or, l’actualité et l’urgence de la France en matière d’exécution des peines est bien au contrai- re de faire baisser de façon effective le nombre de détenus (sur lequel joue bien entendu la durée moyenne de l’incarcération) comme l’exige notamment l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme J.M.B. et autres c. France rendu le 30 janvier 2020. Cet arrêt, sur l’exécution duquel la France doit donner des explications au conseil des ministres du Conseil de l’Europe, impose à la France de remédier de façon pérenne à la surpopulation carcérale qualifiée de structurelle.

A noter que ce même arrêt imposait à la France de mettre en place un recours effectif permet- tant aux détenus de mettre fin aux conditions de détention indignes, ce qui est censé avoir été fait avec le vote (issu d’une proposition de loi, donc sans étude d’impact sur les moyens à allouer aux services judiciaires pour absorber ce nouveau contentieux) de la loi du 8 avril 2021 tendant à garantir le respect de la dignité en détention. Toutefois le Syndicat de la ma- gistrature considère que le dispositif mis en place ne permettra pas de garantir l’effectivité du recours exigée par la CEDH. A ce titre nos observations communes avec l’OIP, le SAF et l’A3D sont consultables ici

Passons sur l’argument du ministre de la Justice prétendant refuser l’automaticité (des crédits de réductions de peine, par ailleurs non pas définitifs puisqu’ils peuvent être retirés) alors que l’automaticité est mise en place pour la LSC (« de plein droit ») à trois mois de la fin de peine. Reprenant d’un côté ce qu’elles donnent de l’autre, le sens des dispositions sur l’exécution des peines du PJL « confiance » est difficile à interpréter, en tout cas dans leur économie générale. En effet, il serait désormais prévu pour un grand nombre de détenus (sous réserve du quantum des peines en cours d’exécution et de la nature des infractions commises), une sortie quasi- ment systématique à trois mois de la fin de sa peine sous le régime de la LSC mais il serait dans le même temps devenu inacceptable d’accorder d’emblée un crédit sur le comportement en détention. En somme, l’exécution des peines se concentre sur le comportement en déten- tion et non plus sur une préparation à la sortie pour que celle-ci se déroule dans les meilleures conditions et soit autant que possible facteur de réinsertion.

Vous trouverez en pièces jointes nos observations détaillées à jour de l'étude d'impact et de l'avis du Conseil d'Etat. 

Observations volet exécution des peines (179.39 KB) Voir la fiche du document