La gestion des conflits en audience pénale : nos observations détaillées devant l'IGJ

A la suite des événements qui se sont produits à l'audience correctionnelle au tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence en mars dernier, l'Inspection a été saisie non seulement pour analyser le déroulement de ces faits, mais aussi, dans un second volet de sa mission, pour formuler de manière générale toutes préconisations d’amélioration utiles dans la gestion des incidents en audience pénale entre magistrats et avocats.

C'est dans ce second cadre que nous avons été entendus la semaine dernière et avons présenté les observations que vous trouverez en pièce jointe. 

Les incidents et conflits lors de l’audience pénale sont révélateurs de problématiques plus larges affectant les relations entre avocats et magistrats. Le Syndicat de la magistrature a donc estimé nécessaire de s’interroger sur ce qui se joue à l’audience lorsque ces conflits interviennent, afin de ne pas seulement proposer des modes de « gestion » des conflits mais de réfléchir aux éléments propres à les prévenir, qui se confondent d’ailleurs en partie avec les éléments propres à y répondre.

La problématique de la compréhension des identités professionnelles respectives (I), question ontologique qui pourrait être approfondie en formations initiales et continues (II), se conjugue avec des facteurs de dissension structurels propres à l’organisation judiciaire en France (évolutions de la procédure, architecture des palais de justice, absence de circulation fluide de l’information entre les différents professionnels, surcharge des services, audiencement…). L’audience étant le moment d’aboutissement des procédures, à l'occasion duquel les acteurs sont réunis, les dissensions nées de ces différents facteurs éclatent. Il ne parait ainsi pas possible de faire l’impasse sur les réformes propres à remédier à tous ces dysfonctionnements pour traiter la maladie et pas seulement ses symptômes (III). 

Au-delà de ces réformes nécessaires, la réponse immédiate à ces difficultés ne se situe pas, selon nous, dans l’élaboration nationale de nouvelles normes ou « guidelines » des relations avocats/magistrats, dont le caractère forcément évanescent et général n’est pas susceptible de répondre aux difficultés rencontrées quotidiennement. En revanche, le constat peut être posé qu’il n’existe aucune instance institutionnelle dans laquelle avocats, magistrats et fonctionnaires de greffe dans les juridictions sont susceptibles de dialoguer sur les difficultés qu’ils rencontrent, en dehors des relations entre bâtonniers et chefs de juridiction. Une piste pourrait être de les mettre en place. Il convient par ailleurs de mettre en oeuvre les moyens, notamment informatiques, propres à une circulation fluide de l’information entre avocats, magistrats, et fonctionnaires de greffe (IV). 

Concernant la gestion de l’incident à l’audience, si l’article 404 du code de procédure pénale, par ailleurs tombé en désuétude, mérite d’être entièrement réécrit, il n’apparaît pas que de nouvelles modalités de gestion directe des incidents, autres que celles rappelées par le CSM dans le recueil des obligations déontologiques, puissent être dégagées. En revanche, la formation des chefs de juridiction devrait être complétée afin que ce type d’incident ne demeure pas sans suite institutionnelle, que ce soit en termes de retour sur l’évènement - qui laisse des traces - avec la collectivité de travail dans la juridiction, de réaction en cas de manquement déontologique d’un avocat ou d’un magistrat, et de communication institutionnelle permettant de rétablir un récit des événements qui ne soit pas unilatéral (V).   

Tous ces points sont développés dans les observations jointes. 

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