Communiqué de presse du Syndicat de la magistrature après la décision du Conseil constitutionnel sur QPC sur le verrou de Bercy

Le verrou de Bercy a de beaux jours devant lui : le Conseil constitutionnel vient de donner un nouveau tour de clé. Ce « verrou » soumet toute décision de poursuites pénales pour des faits de fraude fiscale à l’autorisation préalable du ministre chargé du budget. De fait, cette procédure met à l’abri de tout jugement pénal certains contribuables, avec lesquels l’administration fiscale décide de transiger dans le secret.

Au cœur de cette disposition, qui place le procureur de la République sous la dépendance de fait de l’administration, se niche une conception bien complaisante de la fraude fiscale, quand les fraudes aux prestations sociales par exemple, portant souvent sur de très faibles montants, sont poursuivies et jugées sans faillir.

Dans sa décision rendue ce jour sur question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel ferme les yeux sur l’entorse à l’indépendance de l’autorité judiciaire et dévoile une conception bien curieuse des deniers publics. Il estime ainsi que les actes de fraude fiscale « portent atteinte aux intérêts financiers de l’Etat (et) causent un préjudice principalement au Trésor public ». Il en déduit que l’appréciation verrouillée de l’administration sur l’opportunité de poursuites pénales est légitime.

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen défend une conception bien plus ambitieuse de l’impôt, contribution commune dont tout citoyen a le droit de constater la nécessité et de déterminer le recouvrement.

En validant le verrou de Bercy, le Conseil constitutionnel prive non seulement le procureur de la République de son office de poursuite, mais également les citoyens du pouvoir d’agir contre la fraude fiscale qui nuit aux intérêts de tous.

Le verrou peut toujours sauter : si seulement les parlementaires se saisissaient du projet de loi relatif à la transparence et à la lutte contre la corruption pour le supprimer !