Communiqué du Syndicat de la magistrature en réaction à la tribune publiée dans le Figaro le 28 juin par trois membres du CSM

Les fossoyeurs de la réforme du CSM

Le site Mediapart révélait dans son édition du 1er juillet que le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) venait de rappeler à leurs obligations trois membres de ce conseil.

En cause, une tribune parue dans le Figaro le 28 juin sous la signature de Pierre Fauchon, Jean-Pierre Machelon et Bertrand Mathieu dans laquelle ils dénonçaient un projet de réforme du CSM « en trompe l’œil » et s’interrogeaient sur la nécessité de réunir le Congrès pour mettre en place une parité entre magistrats et personnalités extérieures au sein du conseil.

Des propos qui font étrangement écho à ceux des parlementaires UMP qui, lors des débats, feignaient de croire que la réforme envisagée n’avait pour objet que d’ajouter un magistrat dans la composition du conseil… Députés UMP qui, lors de ces mêmes débats, faisaient état d’un courrier rédigé par « plusieurs membres » du CSM à l’adresse du président de la République pour faire part de leur émotion quant à l’impréparation, voire l’inutilité d’une telle réforme, et qui s’en emparaient pour s’opposer à la réforme, en invoquant une « polémique au plus haut niveau de l’Etat »

En ces temps où les amis politiques de MM. Fauchon, Machelon et Mathieu en appellent à la « neutralité du juge » - fantasme du juge sans idée, sans conviction, sans réflexion - et où les intéressés eux-mêmes dénoncent

« les risques de politisation et de corporatisme » comme « les deux fléaux d’une justice indépendante », la situation révèle, si besoin était, que les membres du CSM, tout comme les magistrats, ne sont pas « neutres », qu’ils sont même pour certains d’entre eux « extrêmement » politisés … En témoigne un entretien de Bertrand Mathieu dans « Les petites affiches » du 18 février 2013 où celui-ci affirme que « la suppression du mot « race » de la Constitution, indépendamment de la validité scientifique de ce concept, relève d’une vision volontariste et totalitariste de l’action politique visant à asservir la réalité à l’idéologie »



Les choses sont claires : une certaine droite ne ménage pas ses efforts pour tenter de faire échouer la réforme du CSM, et ses représentants au sein du Conseil n’hésitent pas, à cette fin, à mettre en avant leur qualité et leur expérience de membres du Conseil.

Et pourtant, la Cour européenne des droits de l’homme vient encore de nous le rappeler s’agissant du statut des magistrats du parquet, cette réforme est indispensable ; les pouvoirs du CSM doivent être sérieusement renforcés en ce qui concerne notamment la nomination des magistrats du siège comme du parquet pour mettre fin à la main mise de l’exécutif sur la carrière des magistrats.

Mais, n’en déplaise à MM Fauchon, Machelon et Mathieu, la composition du CSM et les modalités de désignation de ses membres doivent être également modifiées, non pour promouvoir une « autogestion syndicale de la magistrature » - le Syndicat de la magistrature défend depuis des années la présence d’une majorité de personnalités extérieures dans la composition du Conseil – mais pour garantir le pluralisme et le caractère non partisan de ces nominations.

Une justice indépendante n’est pas une justice irresponsable, le Syndicat de la magistrature – qui s’est déclaré favorable, dès l’origine, à la saisine directe du CSM par les justiciables – l’a toujours défendu ; cette indépendance est avant tout une garantie pour les citoyens, celle d’une égalité de traitement, à l’abri des pressions de quelque nature qu’elles soient.

Tel est l’enjeu majeur de la réforme du CSM. Au-delà des clivages politiques, les parlementaires ont donc une lourde responsabilité : celle de dire s’ils veulent réellement d’une justice indépendante en France.