Lors du CSA-SJ du 14 septembre, les organisations syndicales ont été invitées à donner leur avis sur l’avant-projet de décret instaurant des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales au sein des tribunaux judiciaires et des cours d’appel, avant transmission au Conseil d’État.

Si notre syndicat s’est positionné en faveur du principe de la mise en place de ces pôles qui, comme leur nom l’indique, ont vocation à assurer une meilleure spécialisation des magistrat·es ayant à connaître du contentieux des violences intrafamiliales, nous avons, avec la CGT, fait le choix de nous abstenir au moment du vote. En effet, l’extrême souplesse, revendiquée par la direction des services judiciaires, des dispositions de l’avant-projet de décret a pour conséquence non pas d’assurer la garantie d’un meilleur traitement de ces violences, mais d’entériner des pratiques qui existent déjà dans de nombreuses juridictions et que l’on sait insuffisantes.

Ainsi, par exemple, l’avant-projet de décret reste extrêmement superficiel concernant la composition des pôles, la « spécialisation » de leurs membres en termes de formation, ainsi que la périodicité des réunions du comité de pilotage unique d’évaluation et de suivi. En outre, les membres des « pôles » ne bénéficieront pas nécessairement d’un temps dédié pour mener à bien leurs nouvelles missions.

Craignant que la création de pôles spécialisés relève surtout de l’affichage politique plutôt que d’une réelle volonté d’améliorer en profondeur le traitement judiciaire des violences intrafamiliales, nous avons formulé des observations et propositions que vous trouverez ci-dessous.

  Observations du Syndicat de la magistrature relatives à l’avant-projet de décret en Conseil d’État instaurant des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales (174.35 KB)

 

Aujourd'hui, 9 mars 2023, se tient le troisième comité social d'administration (CSA) ministériel.

Vous trouverez ci-joint le communiqué de presse intersyndical dénonçant la parodie de concertation au sein des instances de dialogue social de notre ministère.

Alors que notre délégation CGT-SM avait fermement dénoncé, lors du 1er CSA M, le passage en force de l'administration pour l'adoption du règlement intérieur, puis boycotté le 2e CSA refusant d'être réduite à une chambre d’enregistrement du pouvoir exécutif, c'est donc désormais en intersyndicale que nous refusons de servir de caution à cette parodie.

 

Dialogue social au sein du ministère de la justice : communiqué de presse intersyndical (119.99 KB) Voir la fiche du document

CP pénal justice de proximité 17 02 22 (39.77 KB) Voir la fiche du document

En décembre 2020, à la suite de l’opération de communication menée par le garde des Sceaux pour accompagner la sortie de sa circulaire dédiée à la justice de proximité – entendue uniquement comme une justice pénale – nous avions d’ores et déjà pu établir quelques pronostics sur le futur discours du ministère dans les mois suivants.

La circulaire en question imposait aux parquets des efforts et des remontées statistiques sur des items précis, permettant d’ores et déjà de prédire ce que seraient les formules chocs dans la bouche de notre garde des Sceaux : les audiences foraines ont augmenté, les mesures de réparation se sont multipliées tandis que les simples rappels à la loi auront diminué. 

A la lecture du communiqué de presse de ce jour, un seul mot : BINGO !

Enfin, à ceci près que le communiqué en question se garde bien d’effectuer des comparaisons avec les années précédentes pour bon nombre des items concernés. Les audiences foraines sont d’ailleurs opportunément rebaptisées « audiences hors les murs du tribunal judiciaire », ce qui permet d’y inclure toutes les audiences qui se tenaient précédemment déjà au sein des ex-tribunaux d’instance.

Au-delà des statistiques, rien ne permet d’évaluer l’efficacité de ladite « justice de proximité » en matière pénale, ni son apport qualitatif. Le ministère se contente à nouveau d’assener des affirmations présentées comme des vérités – comme le supposé sentiment d’impunité des auteurs de ces contraventions et petits délits. Aucune analyse en revanche du casse-tête que devient la détermination de la juridiction amenée à juger une infraction, quand il s’agit de faire du cas par cas, infraction par infraction, entre le tribunal de proximité et le tribunal judiciaire, le tout sur la base d’une simple circulaire. 

Aucune démonstration non plus du fait que l’accélération de la réponse pénale pour ces petits délits et contraventions – dont les délais étaient au demeurant moindres que pour d’autres infractions – aurait un impact en termes de prévention de la récidive. Enfin, aucune mention du reste du champ de la justice pénale, portant sur des infractions bien plus graves. Ainsi, les dossiers correctionnels complexes – notamment issus de l’instruction – et les dossiers criminels, sont ceux dont les délais de jugement apparaissent les plus importants, comme l’inspection générale de la justice a pu le noter dans ses rapports sur le diagnostic de l’état des stocks dans les juridictions. Pour autant, nous attendons toujours que le ministère nous communique des statistiques précises à ce sujet, qui semble bien moins le préoccuper que les petites incivilités…

En avril 2020, la première présidente de la Cour de cassation et le procureur général près la Cour ont chargé Monsieur André Potocki d’une mission sur la Cour de cassation du futur dans une perspective à moyen terme. Cette mission s’inscrit dans le prolongement de plusieurs réflexions menées au sein de la Courqui tendent à répondre à une question centrale : comment préserver la qualité des décisions de la Cour confrontée à une augmentation du nombre de pourvois. Cet état de fait a conduit en interne à plusieurs évolutions que les magistrats des juridictions de fond ne connaissent que trop bien : un recul de la collégialité, un renoncement au délibéré, une pression statistique renforcée et un renforcement de la logique hiérarchique. C’est également l’une des raisons expliquantles souhaits de certains de mettre en place un mécanisme de filtrage des pourvois devant la Cour de cassation - voir à ce sujet, nos précédentes observationset propositionsdisponibles ici et ici

A bien des égards, la mission confiée à la commission présidée par Monsieur André Potocki révèle les tensions qui traversent la Cour. Certains se prennent à rêver d'une Cour suprême élitaire, coupée des juridictions du fond, qui n’aurait à se prononcer que sur un nombre restreint d'affaires sélectionnées en raison de l’importance présumée des questions de droit et de société qu’elles posent : une Cour suprême composée d’un nombre limité de juges, qui délégueraient en réalité leur office en confiant la (pré)sélection des affaires à un service de juristes. 

En opposition à cette conception, le Syndicat de la magistrature dans les observations adressées à la Commission Potocki que vous trouverez en pièce jointe promeut une Cour au service du bien commun de la justice,s’inscrivant dans le renforcement des liens avec les juridictions de fond et dans la continuité de leurs fonctions juridictionnelles. Pour pallier les difficultés rencontrées actuellement par la Cour de cassation, nous recommandons par ailleurs le développement d’un service d’appui aux juges de la Cour favorisant une réelle collégialité, un dialogue de qualité entre les différents degrés de juridictions et l'émergence d’une Cour de cassation ouverte sur la cité et sur l’international.

Nos observations sur la Cour de cassation du futur 2020-2030 (410.55 KB) Voir la fiche du document