L’indépendance de la justice est garantie dans la Constitution de 1958, mais elle est loin d’être effective. Des conditions de nomination des magistrats, qui restent largement entre les mains du pouvoir exécutif, notamment pour les magistrats du parquet, au poids des chefs de juridiction dans la carrière des magistrats et le fonctionnement des juridictions, en passant par l’évaluation, le disciplinaire, les principes d’égalité et de non discrimination dans les nominations, le chemin est encore long pour voir consacrer, dans les textes et dans la pratique, une autorité judiciaire réellement indépendante et à même de garantir, pour tous les citoyens, une justice égale pour tous.

La dernière réforme du CSM, si elle contient quelques avancées, en a fait une instance dépourvue de pouvoirs et de moyens pour garantir cette indépendance. Malgré les promesses du président de la République, le projet de réforme constitutionnelle a été un échec en 2013 et depuis, il semble qu’il n’y ait pas de volonté du Parlement de faire aboutir cette réforme.

C’est pourquoi le Syndicat de la magistrature attendait beaucoup d’une réforme de l’ordonnance de 1958 qui devait, à défaut de réforme du CSM, renforcer l'indépendance des magistrats et notamment celle des magistrats du parquet, améliorer la transparence et l’égalité des magistrats dans les nominations et dans l'évolution des « carrières », repenser la formation des magistrats, renforcer les droits des magistrats dans les enquêtes administratives et les procédures disciplinaires…

Le projet de loi organique présenté aujourd'hui contient des avancées indéniables qui doivent être soutenues. Il prévoit que les JLD seront nommés par décret, progrès notable dans la protection statutaire de ces magistrats revendiqué de longue date par le Syndicat de la magistrature. Il acte l'existence du syndicalisme judiciaire en prévoyant les conditions dans lesquelles les magistrats pourront se voir accorder des décharges syndicales. Il introduit enfin la prescription des fautes disciplinaires et encadre les délais dans lesquels le CSM doit statuer au disciplinaire. Pour le reste, les avancées sont particulièrement minces, les modifications statutaires sont essentiellement techniques, quand elles ne sont pas purement gestionnaires pour faciliter le recours accru à des magistrats exerçant leurs fonctions de façon temporaire ou ponctuelle.

Le statut des magistrats n'est pas rénové en profondeur : aucune évolution sur le statut du parquet ; aucune réflexion sur l'évolution des carrières des magistrats ; aucune remise en cause des exigences de mobilité qui soit de nature à faciliter, pour tous les magistrats, leur avancement ou l'accès aux postes de responsabilité ; aucune réforme du concours d'accès à la magistrature, du contenu de la formation des futurs magistrats, ni de leur sortie de l'ENM ; aucune évolution, enfin, du mode de scrutin des élections à la commission d'avancement, en faveur d'un scrutin direct à la proportionnelle seul à même d’en faire une instance pluraliste et de permettre une représentativité plus démocratique des syndicats de magistrats.

Le Syndicat de la magistrature tient à rappeler l’essentiel de ses revendications, avant d’aborder l’examen du projet de loi article par article....