Cette proposition a pour but de reporter de deux ans les articles 1 et 2 de la loi du 13 décembre 2011 supprimant la juridiction de proximité et maintenant les juges de proximité auxquelles seraient confiées de nouvelles compétences.

Le Syndicat de la magistrature s’est opposé à la création de la juridiction de proximité dès l’origine en soulignant notamment la complexité juridique qu'elle allait entraîner pour les justiciables ( l’étude d’impact et l’exposé des motifs de la loi du 13 décembre 2011 ont fait ce même constat).

Nombreuses ont été les difficultés engendrées par une erreur de saisine dans une déclaration au greffe ou une assignation et le temps perdu de ce fait pour tous.

Nous avions également à l’époque dénoncé le statut précaire des juges de proximité à qui étaient pourtant confiées des missions juridictionnelles et nous avons pu vérifier ces dernières années combien nos craintes étaient fondées, puisqu’en 2010 le nombre de vacations confiées aux juges de proximité a été brutalement réduit de moitié ou totalement supprimé pour des raisons budgétaires.

Le Syndicat de la magistrature rappelle que le tribunal d’instance est par essence le véritable lieu judiciaire de proximité, même si les effets désastreux de la réforme de la carte judiciaire entravent considérablement son rôle dans certaines régions.

Dans le même temps, nous avons insisté lors des auditions parlementaires sur la nécessité de prendre en compte la charge supplémentaire de travail qu’entraînerait la reprise de ce contentieux civil pour les juges d’instance, devant déjà assumer la révision des mesures de protection pour les majeurs d’ici fin 2013, sous peine de caducité de ce mesures.

Vous trouverez ci-joint la lettre restée sans réponse que nous avons adressée le 11 avril 2012 au ministre de la justice Michel Mercier sur la situation des tribunaux d’instance et la suppression de la juridiction de proximité. Malheureusement nos préoccupations n’ont jamais rencontré aucun écho et comme le souligne l’exposé des motifs de la proposition, aucun poste supplémentaire de juge d’instance n’a été crée.

La situation des tribunaux d’instance reste donc particulièrement préoccupante, et nous n’avons pas manqué d’alerter à nouveau la garde des Sceaux par courrier du 30 octobre 2012 que vous trouverez également en copie.

Dans ce contexte catastrophique renforcé par le défaut d’anticipation des conséquences de la suppression de la juridiction de proximité, la proposition de report de la loi du 13 décembre 2011 n’est pas satisfaisante en soi mais nous apparaît difficilement évitable.

Le Syndicat de la magistrature veut toutefois souligner qu’au regard du budget de la justice prévu pour 2013, il n’est pas évident pour l’instant que des postes de magistrats soient crées dans les deux ans qui viennent pour mieux faire face aux conséquences de la suppression de la juridiction de proximité : les recrutements de magistrats prévus pour 2013 ne compensent pas encore les réductions d’effectifs intervenues depuis 2009 et encore moins l’impact des réformes en cours !

Par ailleurs, le report de la suppression de la juridiction de proximité ne suffira pas à lui seul à compenser l’accroissement de travail résultant de la réforme des tutelles , d’autant plus que dans de nombreux endroits, les juges d’instance assument de fait le contentieux de la juridiction de proximité à la suite du départ ou en raison de l’absence de recrutement des juges de proximité.

Enfin au vu de l’exposé des motifs appelant à « une réflexion plus globale sur les juridictions de première instance », le Syndicat de la magistrature tient dès à présent à exprimer son inquiétude quant aux perspectives évoquées de « tribunal de première instance » : ce projet risque d’aboutir à terme à de nouvelles suppressions de tribunaux d’instance, notamment lorsque ceux ci ne sont pas au siège du tribunal de grande instance, et à une disparition de la spécificité des services de l’instance, qui sont pourtant particulièrement accessibles et rapides du point de vue du justiciable.