Communiqué commun Syndicat de la magistrature, SNPES-PJJ, CGT-PJJ et SAF

La réforme de la justice pénale des enfants, plus que nécessaire, maintes fois promise, jamais tangible, revient : le garde des Sceaux vient de l'assurer dans une interview donné à la Voix du Nord le 17 avril 2016. Pour justifier la réforme, la méconnaissance le dispute au cynisme. En effet, le tribunal correctionnel pour mineurs peut disparaître dès à présent puisque, pour Jean-Jacques Urvoas, il « encombre l’activité des TGI et ne prononce pas de sanctions plus sévères ». On aurait apprécié qu’une des seules dispositions que le gouvernement choisit de prioriser, au détriment sans doute d’une réforme ambitieuse, soit plutôt fondée sur le souhait de ne pas aligner la justice des mineurs sur celles des majeurs.
C’est ainsi qu’un horizon politique borné d’un côté par une conception purement arithmétique des moyens de la justice, de l’autre par l’affirmation d’un tropisme répressif de bon aloi, fait passer les besoins des mineurs par pertes et profits. Simplification et accélération de la procédure, à courte vue, seraient manifestement l’alpha et l’oméga de la réponse à l’enfance délinquante.
Mais si nous, magistrats, éducateurs, avocats, voulons transformer la justice pénale des mineurs, ce n'est pas pour enrayer artificiellement la « clochardisation » des tribunaux. La communication bien huilée du garde des Sceaux sur le manque – effectivement criant – de moyens absorbe autant qu’elle dépolitise le débat en éclipsant la nécessaire rupture avec la logique sécuritaire. Ce n’est pas dans l’accélération des « flux » et la réduction des « stocks », au détriment de la qualité du travail auprès des jeunes et des familles, qu’il faut chercher la transformation dont la justice pénale des enfants et adolescents a tant besoin.
L'immédiateté dicte depuis trop longtemps la réponse pénale, à coups de procédures et de dispositifs réduits à leur plus simple appareil, expéditifs et prompts à générer de l’enfermement.
L'ambition de cette réforme doit être, au contraire, de développer les outils éducatifs, permettant de prendre en compte la complexité de parcours de vie d'enfants et d'adolescents qui transgressent la loi. C'est sur le temps long du travail éducatif, grâce à des dispositifs diversifiés - et financés - que peuvent être apportées des réponses conçues dans l'intérêt des enfants et de la société. La suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs n'en est que le plus petit dénominateur.
La justice pénale des mineurs que nous voulons est résolument tournée vers l'éducatif.