Justice pénale

Pour une réforme du ministère public (1ère partie)

Le Syndicat de la magistrature a toujours revendiqué pour le ministère public un statut protecteur. Dans le contexte actuel, cette question apparaît plus centrale que jamais.

En premier lieu, la Cour européenne des droits de l'Homme a envoyé un signal très clair à la France en affirmant, dans son arrêt MEDVEDYEV du 10 juillet 2008, que notre parquet ne saurait être considéré comme une autorité judiciaire, parce qu'il "lui manque en particulier l'indépendance à l'égard du pouvoir exécutif".

En second lieu, la disparition annoncée du juge d'instruction, statutairement indépendant, et l'accroissement subséquent des pouvoirs du parquet, actuellement placé sous l'autorité et le contrôle du garde des Sceaux, pose nécessairement la question d'une modification du statut du ministère public.

Comme l'indiquait déjà le SM lors de son audition par la commission d'enquête parlementaire sur l'affaire d'Outreau, en mars 2006:

"Transférer les prérogatives du juge d'instruction à un parquet dépendant, ce serait donner au ministre de la Justice la possibilité de neutraliser définitivement les investigations sur les dossiers gênants. L'emprise déjà importante de l'exécutif sur le judiciaire serait ainsi consacrée au détriment de la séparation des pouvoirs et du procès équitable".

Or, force est de constater qu'aucune réflexion n'a été engagée sur ce point fondamental, ni par le tristement fameux "comité Léger", qui s'est contenté d'affirmer en passant que les magistrats du parquet agissent "selon le principe d'indépendance" (page 8 de son rapport), ni par la Chancellerie, qui a fait de cet angle mort un préalable à la concertation que nous attendons toujours... Tout le monde se souvient également du silence assourdissant du chef de l'Etat à ce sujet dans le discours qu'il a prononcé devant la Cour de cassation le 7 janvier 2009.

Nous avons donc décidé de nous livrer à une analyse approfondie de la situation du ministère public français, qui apparaît à bien des égards singulière.

1ère partie: la description de l'existant

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